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 ❝there's still a part of me needing part of you❞ (kaylis)

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Cloëlia W. Travis

Cloëlia W. Travis

Date d'inscription : 17/08/2015
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MessageSujet: ❝there's still a part of me needing part of you❞ (kaylis)   ❝there's still a part of me needing part of you❞ (kaylis) EmptyMer 4 Oct - 22:39

❝ Like an open door to an empty room
There's still a part of me needing part of you ❞
ailis james & kaylan maxwell

❝there's still a part of me needing part of you❞ (kaylis) 4304950804171459
Installé sur une chaise près du lit d’Alice, j’essaie de décrypter en même temps qu’elle les messages que Hannah Baker sème derrière elle au fil de ce troisième épisode. La jeune femme a décidé de s’attaquer à celui qu’elle considérait comme son meilleur ami fut un temps, expliquant comme à son habitude les raisons pour lesquelles ce garçon, comme d’autres, l’a poussée au suicide. « Tu penses qu’il lui a fait quoi ? », me demande l’adolescente de seize ans, posant sur moi ses yeux azurin. Je hausse doucement les épaules tout en croisant mes bras. « Peut-être qu’il a répandu une rumeur, lui aussi, va savoir. » Alice pince ses lèvres, l’air réfléchi. Malgré l’heure avancée de la nuit, elle semble parfaitement éveillée pour se forger un avis sur la question. Je sais que vous allez me traiter de mauvais éducateur, de mauvais psy, à regarder une série avec cette adolescente au milieu de la nuit. Mais avant de dire quoi que ce soit, sachez qu’elle est victime d’insomnies contre lesquelles nous n’avons pas encore trouver de solution. Je l’aide donc à passer le temps quand l’angoisse la prend au milieu de son éveil nocturne. Depuis quelques temps, je la retrouve un après-midi par semaine dans ce foyer afin de la suivre de près, passant une journée à ses côtés, rallongeant mon temps de travail parfois jusqu’au lendemain matin. Une adolescente en détresse parmi tous ceux que je rencontre jour après jour. Elle n'a pas a été victime de harcèlement, comme Hanna Baker. La raison principale de sa présence ici n’est autre qu’une énième famille violente qui l’a maltraitée des années durant. Regarder cette nouvelle série Netflix avec elle fait partie du suivi que nous avons mis en place pour elle. Une nouvelle approche selon mon superviseur, approche envers laquelle je reste réticent, ce qui explique pourquoi je regarde 13 Reasons Why avec cette jeune demoiselle. Je préfère m’assurer de près que ces images ne risquent pas de la blesser ou de lui donner de mauvaises idées. Pour l’instant, elle me surprend à prendre les choses avec grande réflexion et maturité. Cependant, notre visionnage est interrompu par mon téléphone qui se met à vibrer dans ma poche. Me redressant, je sors mon portable et fronce les sourcils lorsque je vois le nom de mon frère clignoter sur mon écran. « Un problème ? » Je me lève et remets la chaise à sa place. « Je risque de devoir te laisser pour ce soir. Tu m’attends pour regarder la suite, hein ? » L’adolescente me répond par la positive dans un sourire et, comme signe de bonne foi, éteint l’ordinateur pour le ranger sur son bureau et s’allonger dans son lit. Je lui souhaite bonne nuit et quitte sa chambre, rappelant mon frère immédiatement. « Kaylan ? » D’ors et déjà nerveux, je remonte le couloir du foyer doucement, prenant soin de ne pas parler trop fort. « Y a un problème ? » Ma fille dort chez Kaleb et sa fiancée cette nuit. Je ne suis pas forcément tranquille à l’idée de la laisser chez quelqu'un en ce moment en vue des petits traquas que rencontre Chara. Alors évidemment, recevoir un appel de mon frère aîné est loin de me rassurer. Je comprends d’ailleurs rapidement que j’ai raison de m’inquiéter. « Oui. Faut que tu viennes. On a dû emmener Chara à l’hôpital. » « Quoi ?! », m’exlcamé-je un peu trop fort, m’arrêtant net dans ma marche. « Elle a mal au ventre, elle a vomi et a des poussées de fièvre. Je voulais attendre et voir comment ça allait évoluer, mais Jessica a insisté pour qu’on l’emmène aux urgences pédiatriques. » « J’arrive. » Je m’empresse alors de rejoindre le bureau principal dans lequel se trouve le reste du maigre personnel présent cette nuit. Je leur explique que je suis obligé de partir et leur demande de surveiller Alice de près. Puis je récupère mes affaires et enfile ma veste, mon casque et mes gants tout en sortant du bâtiment.

Grâce à la circulation inexistante en pleine nuit, il me faut très peu de temps pour arriver au St Vincent’s Hospital. Je me gare à la va vite et délaisse ma moto pour rejoindre l’entrée des urgences au pas de course en ôtant mon casque. Je retrouve Kaleb assis dans la salle d’attente des urgences, le teint livide et fatigué. Il meurt d’inquiétude, cela se voit comme le nez au milieu de la figure. Je l’appelle tout en me rapprochant de lui, il m’aperçoit et se lève. « Où est-ce qu’elle est ? » « Ils l’ont installée dans une chambre. Jessica est avec elle. » Le cœur battant la chamade, j’essaie vainement de me rassurer en me répétant que ce n’est rien. Mais si les médecins ont installé ma fille dans une chambre de l’hôpital, c’est certainement qu’il y a de quoi s’inquiéter. « Ils doivent encore faire des examens, mais ils pensent que c’est l’appendicite. » Il ne manquait plus que ça. À demi rassuré en apprenant qu’il ne s’agit cependant pas de symptômes supplémentaires au reste, je suis mon frère le long des couloirs jusqu’à atteindre la dite chambre au cinquième étage. Ma fille est assise dans un lit, habillée d’une blouse de patient rose pâle. Elle pleurniche doucement tandis que Jessica, la fiancée de Kaleb, tente de la consoler. Je m’approche sans un mot, elle me voit et ses pleurs deviennent soudainement plus fort. « Papa… » Sa voix est remplie de détresse. Mon cœur se serre et je m’empresse d’abandonner mes affaires pour la rejoindre et la prendre dans mes bras. Son petit corps tremble contre mon torse alors qu’elle chercher du réconfort pour calmer ses larmes et sa douleur. « Je suis là ma puce, je suis là… tout va bien. » « Ça fait mal. » « Je sais... » Elle s’agrippe à mon cou comme si sa vie en dépendait. Je m’assieds sur le rebord du lit et la laisse s’installer sur mes jambes pour se lover contre moi, ses pleurs s’atténuant petit à petit. « On ne voulait pas t’inquiéter, mais elle était vraiment souffrante. », tente de se justifier ma belle-sœur, visiblement ébranlée par les événements. Je la rassure d’un léger sourire. « Vous avez bien fait. » Constatant alors qu’il n’y a ni infirmière ni médecin dans les environs, j’interroge le jeune couple. « Personne ne l'a prise en charge ? » « Une infirmière a pris ses constantes et lui a palpé le ventre. Le médecin ne devrait pas tarder. » J’acquiesce d’un signe de tête et reporte mon attention sur ma fille. Son visage est crispé sous le douleur, pourtant, je ne l’entends presque plus pleurer. Dégageant les cheveux de son visage, j’embrasse son front et la borde, prenant soin de ne pas lui faire davantage mal.
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Cloëlia W. Travis

Cloëlia W. Travis

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MessageSujet: Re: ❝there's still a part of me needing part of you❞ (kaylis)   ❝there's still a part of me needing part of you❞ (kaylis) EmptyMer 4 Oct - 22:40

❝there's still a part of me needing part of you❞ (kaylis) NEkWBa4t2cQ8w
Je sursaute. La main d’Eleanor s’est frénétiquement refermée sur mon indexe, enfermé dans sa main depuis plus d’une heure, désormais. Quelques millièmes de secondes me sont nécessaires pour comprendre que j’étais en train de m’assoupir, et quelques autres pour réaliser que la petite fille vient, par ce geste simple et presque anodin, de démontrer la force de la vie qui l’habite pour la première fois depuis sa naissance. D’abord inquiète, je jette un coup d’œil à ses signes vitaux, mais constate sur l’écran situé à quelques pas de moi que rien n’est à signaler. Je ne peux alors retenir un sourire, reportant mon attention sur le nourrisson né avec plus de trois mois d’avance, paisiblement endormi dans sa couveuse. Eleanor a dû se battre pour sa vie avant même de voir le jour, et je suis presque sûre que le contact qu’elle vient de prendre avec moi est la preuve que son combat pour la vie s’apprête à prendre fin. Sourcils légèrement froncés, je caresse délicatement le dos de sa main minuscule, cherchant à susciter une réaction de sa part. Elle se fait attendre, mais les doigts de la petite fille se resserrent finalement une nouvelle fois autour du mien. Je souris tendrement, le cœur baladé par ce geste si anodin, si infime, et pourtant si plein d’espoir. « Bah alors ma belle, tu cherches la bagarre ? », prononcé-je dans un souffle de manière à ce qu’elle et elle seule puisse entendre les mots passant la barrière de mes lèvres. « T’as raison, continue. Sois forte. »

Il est minuit passé, et l’hôpital est plongé dans un calme rare. Mon supérieur, chef du département de chirurgie pédiatrique, m’a chargée de veiller sur les signes vitaux d’Eleanor cette nuit et même si je ne suis jamais contre un peu d’action, je ne peux m’empêcher d’apprécier les quelques heures de répit qui me sont accordés. Ma garde ne prendra fin qu’au petit matin après soixante-douze heures, et je sens malgré tous mes efforts les signes tiraillant de la fatigue m’emporter là où je ne suis pas supposée être. Dans un soupire, je laisse mon front reposer contre la vitre de la couveuse sans quitter la petite fille des yeux. Son corps est si menu qu’un seul contact avec elle pourrait la briser. Et pourtant, elle a survécu. Elle survit, chaque seconde qui passe. Et à côté d’elle, je ne peux m’empêcher de me sentir bien ridicule, à manquer de céder au sommeil à chacune de ses inspirations. Si Pearson te voyait, Ailis, il t’enverrait en chirurgie plastique, tiens. Cette seule pensée suffit à me faire garder les yeux grands ouverts, mais elle est interrompue par mon pager. Désagréable, le son perçant du dispositif me ramène aussitôt sur la terre ferme. Avec toute la délicatesse que me permet l’urgence, je laisse mon indexe glisser des doigts d’Eleanor et vérifie ce pour quoi je suis appelée. Salle des urgences, Pearson.

« Bien. James, tu es là. » Je redresse ma queue de cheval, tentant d’apparaître aussi saine et reposée que possible auprès du titulaire de mon service. « J’étais avec la petite Moore. » « C’est vrai. Eh, Coleman ? » L’interne interpellé, un grand brun de la même promotion que moi, lève les yeux du dossier qu’il est en train de consulter, répondant par l’interrogative au docteur Pearson. « Tu es avec qui, cette nuit ? » « Le docteur Simmons, mais il est en salle d’opération. » « Bien. File en pédiatrie veiller sur les vitales de la petite Cooper. » Sans un mot de plus, il me laisse lui remettre entre les mains la tablette contenant le dossier de la fillette, tandis que mon supérieur file déjà dans le couloir menant aux urgences. Nous traversons plusieurs services et descendons deux étages pour parvenir à la mine. Comme partout ailleurs ce soir, l’hôpital est calme. Plus qu’il ne l’est bien trop souvent. « De quoi s’agit-il ? », interroge Pearson sur son ton habituel, mêlant autorité et respect. « Chara Maxwell, quatre ans, se plaint de fortes douleurs abdominales. Elle est victime de vomissements à répétition depuis plusieurs heures. Son père vient d’arriver. » Concentrée sur les symptômes évoqués par l’infirmière qui tend le dossier de la fillette au docteur Pearson, je ne réalise pas tout de suite que le nom m’est familier. Soudainement tendue pour une raison que j’ignore, je suis donc mon supérieur jusqu’à la chambre désignée par l’infirmière. Et alors que nous nous apprêtons à passer la porte, un courant d’électricité me traverse le corps tout entier. Maxwell. Chara. Ces quelques syllabes suffisent à glacer chacun de mes membres et bien qu’elle ne soit qu’à quelques centimètres de moi, la porte me semble à des années lumière. « James, tout va bien ? » « Maxwell, c’est ça ? » « Oui, ça vous dit quelque chose ? » « C’est la fille de Kaylan Maxwell. » « Le psychologue ? » « Oui. » « Et ? Vous êtes mariée avec ce gars ? » Quoi ? « Non. » « Alors on bouge. » Je me mords l’intérieur de la joue, le cœur soudain victime de tremblements désagréables. Je passe le pas de la porte sur les talons du docteur Pearson, fermant un instant les paupières en priant pour qu’une force de la nature inexistante me fasse disparaître. Mais lorsque j’ouvre à nouveau les yeux, il est là. Lovée contre son torse, sa fille, une petite perle blonde microscopique, détient toute son attention. Il ne croise donc pas mon regard avant dix bonnes secondes. Puis il le fait. « Bonsoir. », commence mon supérieur. Souffle court, les yeux attirés par la profondeur azurée des siens, je me laisse propulser des mois en arrière, sentant mes membres trembler alors que je retrouve dans son regard l’étincelle douloureuse qu’y s’y trouvait déjà, lors de notre dernière rencontre. Mais cet éclair n’appartient plus à la même personne, c’est pourquoi je baisse les yeux. Il n’a pas besoin de ça. Pas alors que sa petite fille est dans un lit d’hôpital.

Le docteur Pearson échange quelques mots avec lui avant d’ausculter la petite avec sa délicatesse habituelle. Silencieuse, je reste au pied du lit, tentant d’assimiler les paroles échangées ci et là au cas où mon supérieur venait à se souvenir de ma présence. Ce qu’il ne tarde pas à faire. « Chara, je te présente le docteur James. » Je déglutis, contournant le lit pour me baisser à la hauteur de l’enfant. Je sens le regard de Kaylan me suivre mais reste aussi impassible que me le permettent les tremblements infimes de mon corps. « Salut, ma puce. », soufflé-je tendrement. « Vous l’emmenez passer une radio abdominale, docteur ? » « Bien sûr. » « C’est quoi, une radio ? » Je souris. La seule résonance de la voix musicale de la petite suffit à me faire oublier qui la tient contre elle. « C’est pour voir l’intérieur de ton ventre », expliqué-je, passant la main à quelques centimètres de là où la fillette semble ressentir des douleurs. « Pour qu’on puisse savoir ce qui te fait mal et que ça ne te fasse plus mal, après. Tu veux bien venir avec moi ? » Elle plisse légèrement le nez, soudainement prise de tremblements. Ses yeux s’emplissent de larmes en moins d’une seconde, tandis qu’elle referme avec force ses mains sur l’avant-bras de son père. « Et Papa, il peut venir avec moi ? »
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Cloëlia W. Travis

Cloëlia W. Travis

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MessageSujet: Re: ❝there's still a part of me needing part of you❞ (kaylis)   ❝there's still a part of me needing part of you❞ (kaylis) EmptyMer 4 Oct - 22:40

❝there's still a part of me needing part of you❞ (kaylis) 4304950804171459
La chambre se baigne dans le silence. Tandis que je borde ma fille pour tenter de la calmer du mieux que je le peux, mon frère et sa fiancée reste silencieux. Assis côte à côte, ils se tiennent la main. Je les sens anxieux sans même avoir à clairement poser mon regard sur eux. « Tu veux qu’on reste ? », me demande alors mon frère, alors que Chara se remet à pleurnicher discrètement. Soupirant doucement, je porte mon attention sur le jeune couple, sans m’arrêter de bercer mon enfant. « Non. Enfin je veux dire… » Je ferme les yeux. Évidemment que j’aimerais qu’ils restent. Même si j’ai dû rapidement apprendre à m’occuper de ma fille seul, les situations compliquées comme celle-ci sont toujours difficile à gérer. Cependant, je ne veux pas les retenir. Il est passé deux heures du matin, je préfère les savoir chez eux plutôt qu’ici à lutter contre le sommeil. « Vous avez déjà fait énormément. Rentrez dormir. » Pour leur prouver que je pense à leur bien-être tout en sachant que je peux gérer la situation seul, je leur adresse un sourire rassurant. Kaleb et Jessica s’échange alors un regard et se mettent d’accord sans avoir à parler. Tous deux se lèvent alors et enfilent leur veste. « Tu nous tiens au courant ? » J’acquiesce d’un signe de tête. Mon frère me sourit brièvement et me serre l’épaule en signe d’encouragement. Puis il caresse délicatement la tête de Chara sans un mot. Pour sa part, Jessica vient déposer un rapide baiser sur ma joue en guise d’adieu et fait de même sur le front de la petite, la couvant d’un sourire maternel rassurant. « Courage, ma pucinette. », souffle-t-elle avant de se redresser. Puis, après m’avoir adressé un dernier regard, tous deux sortent de la chambre, me laissant seul avec ma fille. Je reporte toute mon attention sur cette dernière, une fois la porte refermée. Luttant contre le sommeil, je comprends sans qu’elle n’ait à me le dire qu’elle souffre. La serrant un peu plus contre moi, je porte ma main contre son visage pour le lui caresser avec amour. Ce geste a toujours eu la capacité de la calmer et de la rassurer, ce depuis sa naissance. « On rentre ? », finit-elle par me demander d’une toute petite voix. « Pas tout de suite, ma puce. On doit attendre les médecins avant. » « Mais je veux rentrer… », chouine-t-elle en levant vers moi ses yeux noirs embués de larmes. Je pince les lèvres. J’aimerais pouvoir exercer son désir, malheureusement, c’est impossible. « Je sais, Chara. Je sais. » Que puis-je lui dire d’autre ? J’aimerais pouvoir la rassurer, lui dire que tout ira bien. Mais je n’en suis pas capable pour l’instant, ignorant tout de son état de santé actuel et de ce qui s’en suivra. Je ne peux donc que continuer la bercer doucement, priant pour que le médecin en charge de son dossier arrive rapidement et fasse le nécessaire pour poser un diagnostic et lui offrir les soins nécessaires. « Tu es très courageuse, tu le sais ça ? » Je m’oblige à lui sourire, lui adressant un regard fier. Elle n’a que quatre ans et, pourtant, si l’on croit les dires de l’infirmière qui suppose une crise d’appendicite, elle ne bronche presque pas alors qu’elle doit souffrir le martyre. Chara a toujours été très brave, malgré toutes les embûches qu’a pu semer la vie sur son parcours d’enfant. C’est quelque chose que j’admire chez elle et dont je suis vraiment fier.

On frappe à la porte et j’entends une voix masculine m’adresser : « Bonsoir. » Je relève rapidement la tête et reconnais sans aucun mal le docteur Pearson avec lequel j’ai déjà eu l’occasion de travailler en collaboration dans le cadre de ma profession. « Bonsoir. », lui réponds-je de manière polie avant de poser à nouveau mes yeux sur Chara. Elle s’est davantage blottie contre moi, dissimulant son visage contre mon torse alors que sa main a agrippé ma chemise. Je sens de légers tremblements secouer son corps d’enfant, si bien que je caresser avec douceur son dos en espérant lui prodiguer la protection dont elle a besoin en cet instant. « Je ne perds pas de temps avec les présentations, vous savez qui nous sommes. » « Certes. » Je ne relève pas la tête avant plusieurs secondes. Mais lorsque je le fais, je constate que le médecin n’est pas seul. Mon cœur vacille brutalement lorsque je reconnais son visage surplombé d’une cascade de vagues blondes relevées en une queue de cheval. Ailis. Cela fait sept mois que mon regard n’a pas recroisé le sien. Il ne suffit que d’une seconde pour que tous les souvenirs enfouis au plus profond de ma mémoire ressurgissent. Mon palpitant se tord, rajoutant à mon inquiétude bon nombre d’émotions que je me suis interdit de ressentir ces derniers mois. Je ne peux alors m’empêcher de la regarder dans un air mêlant rancœur, regret et douleur. Elle baisse les yeux, ce qui ne m’empêche pourtant pas de continuer à la regarder. Elle est aussi belle que dans mes souvenirs. Mais la rancune que j’éprouve à son égard m’empêche, pour l’instant, de ressentir tout ce que j’ai pu ressentir pour elle par le passé. Fut un temps où nous étions proches, où nous passions de longues heures ensemble au chevet de Connor. Un temps où mon cœur s’était attaché à elle, certainement plus que ce qu’il n’aurait dû. Mais maintenant, il n’y a que cette aigreur réveillée, cette colère qui n’a jamais trouvé de réel assouvissement.

« Pouvez-vous me décrire ce qu’il s’est passé ? » La voix du docteur Pearson me rappelle à la réalité. Battant des paupières, je reporte mon attention sur lui et, après un court silence, je lui réponds. « Je n’étais pas avec elle. » Les sourcils de l’homme à blouse blanche se froncent. Quoi ? Un père se doit d’être vingt-quatre heures sur vingt-quatre avec ses enfants ? Serrant les dents, je me décide alors à lui donner des explications pour éviter toute fabulation. « Je travaillais. Elle était chez mon frère. À ce qu’il m’a raconté, elle s’est réveillée en pleurant, avec un mal de ventre. Elle a vomi. Je n’en sais pas plus. » Le médecin acquiesce alors et s’approche de nous. Demandant la permission, il ausculte alors rapidement Chara. Je suis obligé de maintenir celle-ci de sorte à faciliter les choses, car elle semble refuser qu’on la touche, pleurnichant en essayant de se coller contre moi. Il arrive pourtant à obtenir les informations qu’il recherche et s’éloigner d’un pas avant de me regarder, permettant ainsi à ma fille de se blottir à nouveau contre mon torse. « Son abdomen est rigide. Ceci ajouté aux vomissements et aux poussées de fièvre me laisse penser qu’il s’agit peut-être de l’appendicite. Une radio nous permettra d’en savoir plus. » Je n’ai donc pas plus d’informations qu’il y a dix minutes, je vais encore devoir attendre. Je prends cependant mon mal en patience et acquiesce d’un simple signe de tête. Le docteur Pearson se décale et s’adresse à nouveau à sa patiente, d’une voix qui se veut douce et rassurante. « Chara, je te présente le docteur James. » À l’entente de son nom de famille, mon cœur tressaille. Je m’oblige à garder mes yeux rivés sur le visage de ma fille. Je n’ai pas le courage d’affronter Ailis, pas dans une telle situation. Celle-ci s’approche pourtant afin de pouvoir parler à l’enfant. Elle est suffisamment proche pour me permettre d’humer son parfum. Je ferme les yeux et déglutis. « Vous l’emmenez passer une radio abdominale, docteur ? » Alors que l’interne adhère, ma fille laisse entendre sa voix pour la première fois depuis l’arrivée des médecins, demandant ce qu’est une radio. Ailis lui offre une réponse douce et adaptée. Cela n’empêche pourtant pas l’enfant d’avoir peur. Si on lui demande de suivre la jeune femme, elle comprend sans mal qu’elle se retrouvera loin de moi. Et dans un milieu inconnu et inquiétant comme peut l’être celui d’un hôpital, la peur de la séparation refait surface avec violence. Elle s’agrippe à mon bras, son corps se mettant alors à trembler comme une feuille. « Et Papa, il peut venir avec moi ? » « Il pourra t’accompagner un moment, oui. » Je sais parfaitement que je pourrai venir avec elle jusqu’à la salle mais que je devrais la laisser seule pour faire les radios en question. Cette perspective ne me réjouis pas, nous n’avons cependant pas le choix. Caressant à nouveau le visage de Chara après l’avoir redressée pour qu’elle soit assise sur mes cuisses, je lui murmure : « Ne t’inquiète pas. » Je ne serai pas loin. Jamais je ne la laisserai. « Vous êtes entre de bonnes mains. Je reviendrai tout à l’heure, quand les radios seront faites. » J’échange un ultime regard avec le docteur Pearson et celui-ci demande à son interne de le prévenir une fois les radiographies disponibles avant de sortir de la chambre. Nous nous retrouvons alors seuls tous les trois, un silence plombant et étouffant s’installant entre nous tandis que ma fille continue de couiner contre moi, ses doigts serrant toujours mon bras. Un malaise plus important me gagne. Cette situation me sort davantage de ma zone de confiance et je décide d’y mettre un terme. « On vous écoute, docteur James. » Mettre de la distance émotionnelle entre elle et moi est la seule solution s’offrant à moi pour me protéger en cet instant même. Je sais que nous n’en resterons pas là, évidemment. Mais dans l’immédiat, je préfère fuir son regard, la laisser faire son travail et rester concentré sur ma fille.
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Cloëlia W. Travis

Cloëlia W. Travis

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MessageSujet: Re: ❝there's still a part of me needing part of you❞ (kaylis)   ❝there's still a part of me needing part of you❞ (kaylis) EmptyMer 4 Oct - 22:40

❝there's still a part of me needing part of you❞ (kaylis) NEkWBa4t2cQ8w
Petite, je n’ai toujours rêvé que d’indépendance. D’autonomie, de liberté. Peut-être était-ce dû au fait de ne jamais vraiment avoir eu de pied à terre, ou bien était-ce justement que je rêvais parfois d’en avoir un, sans ne plus avoir à dépendre des folies nomades de mes parents. Une chose est sûre, j’ai toujours apprécié être seule. Dès l’instant où mes parents ont considéré que j’avais l’âge de partir seule à l’aventure, je l’ai fait, sans une once de peur ou d’appréhension. Durant des jours entiers, je m’évadais là où le vent me portait, plongeant dans les sources et gravissant les montagnes en espérant pouvoir un jour ne dépendre que de moi-même. C’est le cas aujourd’hui, et mon désir, mon besoin d’indépendance est plus fort qu’il ne l’a jamais été. Je peine parfois à le réprimer à l’hôpital, m’attirant les foudres de mes supérieurs lorsque ceux-ci notent ma volonté pressante de voler de mes propres ailes. Mais j’ai beau essayer d’apprendre à travailler en équipe, je ne rêve que d’une chose : devenir un jour un assez bon médecin pour que l’on me laisse seule.

Aujourd’hui, je donnerais pourtant n’importe quoi pour que le docteur Pearson ait le temps de pouvoir s’occuper lui-même de notre petite patiente. Pas par peur de ne pas être à la hauteur, ça non. Par peur de lui. Les joues brûlantes, les lèvres tremblantes, je sens son regard insistant me dévisager alors même que je l’ignore ouvertement. Dévorante, l’envie de gracier mes yeux de sa vision est pourtant bien là, mais je sais qu’y céder sera plus douloureux encore que de la réprimer. Je me contente donc d’offrir un sourire réconfortant à la fillette, déboussolée à l’idée de devoir quitter son père le temps des radios. Selon leur tempérament, les enfants réagissent différemment à l’idée de voir leur famille sortir de leur champ de vision quelques minutes. Certains pleurent, d’autres gardent le sourire jusqu’à l’instant même de la séparation. Mais dans l’ensemble, beaucoup sont ceux qui finissent par céder une fois leur curiosité attisée. La perspective de voir les machines, ou même celle de grimper sur un brancard roulant suffit à détourner leur attention de l’appréhension qu’ils ressentent à l’idée de sortir seuls de la chambre. Pourtant, j’ai le désagréable sentiment que les choses risquent d’être compliquée, avec Chara. La blondinette est si accrochée à son père qu’elle semble vouloir fusionner avec lui, et j’ai l’impression qu’elle a cessé d’écouter ce qu’il se passe autour d’elle, espérant inconsciemment que la réalité sera différente si elle n’y prête pas attention. Cette seule constatation suffit à faire grimper mon anxiété déjà bouillonnante à l’idée de me retrouver seule avec Kaylan. Pearson m’adresse quelques mots, auxquels j’acquiesce vaguement sans prêter véritablement attention à son départ. Le silence tombe dans la pièce, lourd, glacé, si froid qu’il me donne la sensation de brûler. Et alors que je m’apprête à ouvrir la bouche pour tenter de le briser, c’est finalement Kaylan qui prend la parole. « On vous écoute, docteur James. »

Je serre la gorge, ignorant tant bien que mal la douleur que ses mots infligent à mon cœur serré. Il n’a aucune raison de se comporter autrement, je le sais, mais la froideur de son ton me blesse beaucoup plus qu’elle ne le devrait. Par ses paroles, il impose entre nous une distance dont je connaissais l’existence, mais auxquelles je n’avais, jusqu’à aujourd’hui, pas encore été confrontée. J’essaye cependant de garder la tête haute et lève enfin les yeux vers lui, feignant d’ignorer sa démarche blessante. « Les radios sont réalisées à l’étage en dessous. Vous pouvez nous accompagnez sans problème jusqu’à la salle, mais Chara devra faire la radio toute seule. Ça ne durera que quelques minutes, c’est promis. » Je baisse les yeux, soulageant par ce simple geste mes pupilles enflammées. « Ma puce… », reprends-je, à l’intention de la petite. « Est-ce que tu veux marcher, ou tu préfères descendre sur un fauteuil roulant ? » Hésitante, elle dégage un instant son visage du torse de son père. « Papa il peut venir sur le fauteuil roulant ? » Je souris. « Non, c’est juste pour toi. Mais Papa vient avec nous jusqu’en bas, il pourra te tenir la main ou pousser le fauteuil. Comme tu préfères. » Je lui prends délicatement la main et lui en caresse machinalement le haut. Elle porte autour du poignet un bracelet violet à l’effigie de la Princesse Raiponce, ce qui ne manque pas de me faire sourire. « C’est ta Princesse préférée, Raiponce ? » Soudain plus alerte, elle regarde son père avec de grands yeux et tourne à nouveaux ceux-ci vers moi. « Non. Mais j’aime bien la chanson. » « Je veux y croire ? » « Oui, celle-là aussi, mais non, l’autre. » Je plisse les yeux, faisant mine de chercher, mais elle reprend. « Où est la vraie vie ? » « T’as raison, elle est encore mieux. » Elle sourit d’un sourire angélique, mais son expression se tend à nouveau alors qu’elle se plie en deux, se remettant aussitôt à pleurer. « Je reviens tout de suite, Monsieur Maxwell. » Je sors de la pièce en hâte et file aussitôt au bout du couloir, où j’attrape un fauteuil. Je fais le chemin en sens inverse et m'apprête à pénétrer à nouveau dans la chambre quand une force invisible me retient en arrière. Je me fige, silencieuse, et inspire profondément, laissant un instant mon dos et l’arrière de ma tête reposer contre le mur. Je peux le faire. Chara est une patiente comme les autres, je n’ai qu’à traiter Kaylan comme je traite tous les autres parents. Après avoir une ultime fois repris mon souffle, je passe le pas de la porte. « Allez Chara, c’est parti. » Alerté, Kaylan se lève et porte délicatement sa fille du lit au fauteuil, sur lequel elle prend place sans un mot, son petit poing frottant doucement son œil droit. Instinctivement, je me place derrière le fauteuil et entreprends de le pousser, permettant à Kaylan de rester dans le champ de vision de Chara. « Il risque d’y avoir un peu d’attente, mais ça devrait être rapide. », dis-je, aussi imperturbable que possible. Je prends soin de ne pas le regarder et cherche péniblement une chose à dire, mais aucune parole sensée ne semble vouloir sortir de ma bouche. Rien d’étonnant, lorsque l’on connaît ma personnalité silencieuse et effacée, mais j’aurais bien aimé trouver une banalité à échanger. Ne serait-ce que trouver un moyen de le rassurer dans ce moment qui, je le sais, l’atteint bien plus qu’il ne veut bien le laisser paraître. Mais je reste silencieuse. D’abord de longues secondes dans le couloir, puis dans l’ascenseur. Je le laisse discuter avec sa fille, me mordant frénétiquement la lèvre chaque fois que le timbre grave de sa voix brise le silence autour de nous. Je savais que j’avais souffert, en le voyant disparaître de ma vie comme il l’avait fait, mais je n’avais pas réalisé qu’il me manquait. En tout cas, pas à ce point.
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Cloëlia W. Travis

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MessageSujet: Re: ❝there's still a part of me needing part of you❞ (kaylis)   ❝there's still a part of me needing part of you❞ (kaylis) EmptyMer 4 Oct - 22:40

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Je ne suis pas comme ça. Je ne suis pas ce type froid, distant, dénudé de toute sympathie. Je ne l’ai jamais été, encore moins avec Ailis. Nous avons passé tellement d’heures ensemble, des milliers de minutes durant lesquelles je lui ai naturellement montré quel homme passionné, bienveillant et concerné j’étais. Elle me connaît. Malgré tout ce que je peux penser en ce moment et tous les efforts que je mets en place pour m’en convaincre, elle me connaît. Elle sait qui je suis. Et j’entends une voix susurrer à mon oreille qu’elle n’a rien fait pour mériter de faire face à Mister Hide résidant en moi. Je le sais, mais je n’arrive pas à me comporter autrement. Sa présence éveille bien trop de souvenirs, bien trop de douleur. Je suis obligé de me tenir à distance, car, je le sais, dès le moment où les barrières s’effondreront, c’est l’apocalypse qui déversera sa rage dévastatrice sur nous. Et je n’ai aucune envie de voir où cela va nous mener. Je ne veux pas arriver au point où la souffrance, que j’ai appris à dompter depuis la mort de Connor, se réveille et se fasse entendre. Alors oui, je lui parle comme si elle n’était qu’une simple interne faisant son travail. Un médecin comme un autre. Pourtant, elle est bien plus que ça. Tellement plus que ça. Je le sais. Je le sens. Mais je m’efforce à taire toute sensation qui me relie à elle. Je m’oblige à centrer toute mon attention sur Chara, laissant mon inquiétude de père m’envahir de toute part. Dieu sait que la présence d’Ailis m’est brûlante, malgré tout. Elle a une emprise sur moi, un pouvoir que je ne peux malheureusement pas contrôler et que je dois me contenter d’ignorer au meilleur de mes possibilités.

Elle accuse mon ton froid dans un silence incommode. Je n’ai pas besoin de la regarder pour comprendre que mes mots la dérangent. Je déglutis, prenant soin de garder mes yeux rivés sur Chara. Ses paupières se plissent, son visage se crispe, je l’entends qui gémit. Par réflexe, je la serre délicatement contre moi tout en la bordant avec douceur. J’aimerais tant pouvoir effacer la douleur qu’elle ressent dans son petit corps d’enfant. « Les radios sont réalisées à l’étage en-dessous. Vous pouvez nous accompagner sans problème jusqu’à la salle, mais Chara devra faire la radio seule. Ça ne durera que quelques minutes, c’est promis. » Je pince les lèvres. Je sais tout cela, je connais ce discours. Je l’ai non seulement déjà entendu mais ai également suffisamment emprunté le chemin menant à l’espace réservé aux radiographies dans le cadre de mon travail. Pour la première fois depuis de longues minutes, je pose mes yeux sur elle. Je fais cependant face à un mur : son regard est baissé, m’empêchant d’entrer dans une quelconque forme de communication avec elle. Je pince les lèvres et me contente donc de l’observer alors qu’elle s’adresse à ma fille. Toujours recroquevillée sur elle-même et agrippée à moi, Chara écoute la jeune femme avec attention et n’hésite pas à lui faire comprendre à sa manière qu’elle ne veut pas se séparer de moi pour l’instant. « Papa il peut venir sur le fauteuil roulant ? » Touché, je retiens un sourire. Je laisse pourtant ma main caresser délicatement les ondulations blondes qui tombent en cascade autour de son visage. Je ne manque cependant pas de remarquer le vrai sourire qui prend d’assaut les lèvres d’Ailis. Mon cœur se serre. J’avais presque oublié à quel point elle était belle, encore plus en souriant de la sorte. « Non, c’est juste pour toi. Mais Papa vient avec nous jusqu’en bas. Il pourra te tenir la main ou pousser le fauteuil. Comme tu préfères. » La réponse ne semble pas convenir à la petite fille. Son visage se teint d’une moue déçue dans laquelle je reconnais une once de panique. Heureusement, la jeune interne agit d’une manière que je considère comme incritiquable : elle attrape doucement la main de sa patiente et engage la conversation sur le meilleur sujet qui puisse être concernant celle-ci, à savoir le monde de Disney. Vous me direz que tous les enfants aiment cet univers, et vous avez raison. Mais pour cette enfant-ci, il s’agit bien plus que de dessins animés distrayants et remplis de magie. Ils représentent un véritable moteur quotidien, une motivation qui lui permet d’oublier les difficultés qu’elle rencontre dans la vie à à peine quatre ans. Ils représentent également beaucoup en ce qui concerne le lien qui nous unit, elle et moi. Notre complicité se joue notamment autour de ces long-métrages, que cela soit en les regardant ensemble pour la énième fois, en dansant sur les musiques à plein tube dans notre appartement ou en chantant les paroles à toute heure de la journée. Ainsi, vous l’aurez compris, la doctoresse ne pouvait pas mieux tomber. Chara me lance d’ailleurs un regard que je devine émerveillé avant de regarder à nouveau la jeune femme pour lui répondre. S’ensuit une conversation que je trouve attendrissante. Je reconnais ma fille sans aucun mal, autant dans ses paroles que dans les mimiques qu’elle exprime au moment d’évoquer sa chanson préférée du film Raiponce. Cependant, cette trêve ne dure qu’un instant. Son visage se transforme instantanément, se déformant dans une grimace de douleur. Elle se remet immédiatement à pleurer, se réfugiant une nouvelle fois contre mon torse en se repliant sur elle-même. « Je reviens tout de suite, Monsieur Maxwell. » Sans que je n’aie le temps de répondre, Ailis disparaît. Je me retrouve alors seul, totalement désemparé face à ma fille rongée par la douleur de sa crise d’appendicite suspectée.

J’essaie de la calmer, la berçant en sachant pertinemment que cela ne servira à rien. Mes remèdes de Papa habituels n’auront aucune emprise sur sa douleur physique. Les médecins sont les seuls à pouvoir l’aider, et cette perspective me rend malade. « Papa… », m’appelle Chara d’une voix chevrotante. Je baisse mon regard sur elle. Ses larmes ne cessent de couler. « J’ai peur. » Mon cœur se contracte violemment. « Peur de quoi ? » « La radio. » Évidemment. Quoi de plus effrayant pour un enfant aussi jeune que de se retrouver dans un tel lieu pour la première fois ? Je caresse son visage pour la rassurer et la débarrasser des traces salées persistant sur son visage. « Tu ne risques rien. » Un nouveau gémissement lui échappe. Ce n’est pas la bonne méthode pour débarrasser une petite fille de ses craintes, je le sais mieux que quiconque. J’essaie alors autre chose, en priant pour que cela fonctionne et l’aide au moins à ne plus avoir peur de ce qui l’attend. « Tu sais que… tu vas peut-être pouvoir faire un voyage dans le temps ? » Intriguée, elle se frotte les yeux et renifle, ravalant ses pleurs pour m’écouter. Je ne perds pas de temps et continue sur ma lancée. « Ils recrutent des enfants comme toi pour leur faire faire un voyage dans le temps. » « Ça veut dire quoi recrutent ? » « Ça veut dire que là, dans la salle de radio, on va te faire passer un petit test. Un tout petit. Tu ne sentiras rien du tout, promis. » Moyennement convaincue, elle étudie mes propos d’un air réfléchi. Je suis cependant rassuré de voir que j’ai visé juste. Il ne me reste qu’à tisser autour de cette histoire pour qu’elle prenne confiance jusqu’à l’éventuelle opération chirurgicale à venir. « Et selon le résultat de ce test, tu iras peut-être faire un voyage où il te suffit de fermer les yeux pour avancer dans le temps.. » Elle plisse les yeux, comme elle a l’habitude de le faire lorsqu’elle croit que je lui raconte des histoires. « Tu mens. », décrète-t-elle. Cela me fait sourire. « Non. » « Si, Papa. Tu te moques de moi. » Un petit rire lui échappe, sourire qui lui tire cependant une grimace. Son ventre la fait réellement souffrir et je suppose que le moindre mouvement peut lui faire mal. « Je te promets que non. » Elle ouvre la bouche pour me répondre, mais nous sommes interrompus par le retour d’Ailis. « Allez Chara, c’est parti. » Je lui jette un bref regard avant de me relever en prenant ma fille correctement dans mes bras, marchant jusqu’à pouvoir la déposer dans la chaise roulante.

Avant même que l’interne ne se mette à pousser le siège, mon enfant agrippe ma main. Mon pouce en caresse le dos pour lui assurer que je ne pars pas. Je me mets dès lors à marcher près d’elle, suivant le rythme imposé par Ailis qui pousse la chaise sans prononcer le moindre mot. La traversée du couloir se fait dans le silence, silence durant lequel je scrute régulièrement Chara pour m’assurer qu’elle ne cède pas encore une fois à la panique. Tout semble se passer pour le mieux. Durant notre trajet, elle s’occupe en observant ce qui nous entoure, ses yeux se posant sur le personnel médical comme sur les autres petits patients du service. Il me semble que voir d’autres enfants dans la même situation qu’elle la rassure dans un certain sens. « Il risque d’y avoir un peu d’attente, mais ça devrait être rapide. » J’adresse un bref regard à la jeune femme et acquiesce silencieusement d’un signe de tête. Nous atteignons finalement l’ascenseur dans lequel nous nous engouffrons afin de pouvoir accéder à l’étage inférieur. Une fois les portes refermées, Chara tire sur ma main pour attirer mon attention. « Papa ? » Je la regarde. Ses yeux me témoignent son intérêt. « Les enfants, ils vont tous faire le voyage ? » Je lui souris tendrement. Bien que peu aventurière dans les terrains inconnus, elle fait toujours preuve de beaucoup de curiosité et de déterminisme afin d’obtenir des réponses à ces questions. Cela qui m’a toujours impressionné chez elle. « La plupart, oui. » « Et ils ont tous fait le test de la radio ? » Pris au piège, je pousse mon "mensonge" un peu plus loin en lui répondant par l’affirmative. « Oui, ils l’ont tous fait. Et maintenant, beaucoup d’entre eux vont faire ce voyage. » Silencieuse, Chara m’observe puis glisse son regard vers AIlis qui n’a pas décroché un mot depuis notre départ de la chambre. J’ai pourtant senti ses yeux planer sur nous durant notre échange dans l’ascenseur. Je regarde alors devant moi. La porte s’ouvre, nous sortons et remontons un nouveau couloir pour rejoindre le service de radiographie. Comme prévu, il y a beaucoup de monde aux alentours. Reste à espérer que nous pourrons rapidement en finir avec ça. Alors que mon regard se perd sur les personnes qui passent devant nous, je sens une seconde pression sur ma main qui m’encourage à porter mon attention sur Chara. « Oui, ma puce ? » « Tu peux chanter la chanson ? » Elle n’a pas besoin de me donner davantage de détails, je sais très bien de quelle chanson elle parle. Pas une chanson, notre chanson. Il y en a plusieurs, mais une seule d’entre elles peut la rassurer dans un moment comme celui-là. Je m’exécute donc sans me faire prier. Je m’accroupis face à elle en appuyant mes bras contre les accoudoirs de la chaise roulante. Le bleu de mes yeux rencontre la noirceur des siens, et je me mets à chanter, d’une voix douce, presque susurrée. Je doute que les personnes présentes autour de nous ont envie d’entendre ma voix. « Oublie ton chagrin, surtout ne crains rien. Je prends en main ton destin. Lorsque le danger te menacera, je serai là, avec toi. » Je marque une pause. Elle m’encourage à continuer en posant ses paumes sur le dos de mes mains. « Tu es si forte et si fragile. Viens dans mes bras, je te ferai une île. Ce lien qui nous lie ne cassera pas. Ne pleure pas, je suis là. » Elle sourit délicatement et sa voix rejoint la mienne naturellement. « Car tu vis dans mon cœur. Oui, tu vis dans mon cœur. Dès maintenant, jusqu’à la nuit des temps. » Nos pupilles ne se lâchent pas, nous faisant ainsi vivre un moment hors du temps. Un instant où nous sommes seuls, elle et moi, et où je suis capable de la protéger contre vents et marrées. Malheureusement, cela ne dure que quelques secondes. Nous sommes rappelés à la réalité par Ailis qui nous annonce que c’est au tour de Chara d’entrer dans la salle de radiographie. Je me relève alors sans un mot et dépose un baiser sur le haut de la tête de ma fille avant de lui glisser : « Je t’attends ici. » Elle acquiesce et je la laisse entre les mains de l’interne qui, sans un mot supplémentaire, l’emmène avec elle. Je me laisse tomber sur une chaise dans le couloir et m’apprête à attendre quelques minutes, priant pour que Chara ne cède pas à la panique.
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Cloëlia W. Travis

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MessageSujet: Re: ❝there's still a part of me needing part of you❞ (kaylis)   ❝there's still a part of me needing part of you❞ (kaylis) EmptyMer 4 Oct - 22:41

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Le regard droit devant moi, je me concentre sur le rythme de ma respiration. J’ai bien conscience du caractère désolant de cette distraction, mais sa présence m’est bien plus douloureuse que je ne l’aurais imaginé. Chaque mot, chaque parole qu’il prononce, chaque geste qu’il fait et chaque expression qu’il affiche se répercutent en moi comme des coups qu’il m’adresserait inconsciemment. J’ai beau ne pas le regarder, j’entends dans sa voix chaque trémolo, chaque tremblement et sais instantanément comment doivent, au même moment, se déformer les traits de son visage. Je discerne dans sa voix une sonorité aigue presque imperceptible au moment où je l’entends tendrement mentir à sa fille. Et je sais qu’en cet instant, il détourne le regard en plissant le nez, comme il le faisait chaque fois qu’il me racontait une connerie auparavant. Une manie dont a d’ailleurs hérité Chara, comme je n’ai pu m’empêcher de le remarquer. Je sais aussi qu’à l’instant où sa fille lui a demandé de se mettre à chanter, son silence s’est accompagné d’un froncement presque invisible de ses sourcils, que sa bouche est restée entrouverte quelques instants, le temps qu’il s’humidifie les lèvres avant de les arquer en un fin sourire. Je sais tout ça, sans même le regarder, et je préfère me concentrer sur le rythme de ma respiration. C’est probablement plus sain, et sans aucun doute moins consternant.

Il ne me facilite cependant pas la tâche. Répondant à la demande de sa fille, Kaylan s’accroupit face à elle et se met à chanter si bas, si doucement qu’aucune autre personne que moi n’est probablement capable d’entendre sa voix. La gorge serrée, je m’oblige à regarder ailleurs. Les fixer rappellerait peut-être ma présence à Kaylan, et je n’ai aucune envie de lui briser ce moment. Je laisse donc mon regard se perdre autour de moi, observant les autres patients entrer et sortir régulièrement des autres salles de radiographie. J’aperçois Autumn, interne de la même promotion que moi, à l’autre bout du couloir. En me voyant ainsi immobile à observer le vide, elle m’adresse un signe de tête. Je lis sur ses lèvres qu’elle me demande si ça va. Je me contente de répondre par un hochement de tête vague, ignorant tant bien que mal la douceur que je perçois sans le vouloir dans la voix de Kaylan. Je l’ai connu ainsi, j’ai passé des dizaines d’heures en sa compagnie, à puiser inconsciemment dans son caractère paisible et docile le courage de traverser les journées difficiles. Pourtant, nos dernières minutes passées ensemble ont été si dures, si violentes qu’elles ont tout ravagé sur leur passage. Chaque fois que j’ai le malheur de penser à lui, le souvenir de ses yeux parsemés de tristesse et de colère me revient en plein visage, et je suis incapable de ressentir à nouveau la douceur qu’il m’inspirait. Pourtant, il n’en a rien perdu, et cette seule vérité suffit à faire naître en moi une nostalgie douloureuse. Pensive, j’observe Autumn prendre soin de son propre patient durant quelques instants. La porte de la salle de radio finit cependant par s’ouvrir, m’extirpant instantanément de mes pensées. « C’est à nous. », soufflé-je, happée par la culpabilité de devoir les séparer dans un moment si complice. « Je t’attends ici. », souffle Kaylan à sa fille. Je m’apprête à lui dire que ce ne sera pas long, comme je le fais habituellement pour mes autres patients, mais il prend tellement soin d’éviter mon regard que je ne peux me résoudre à lui adresser un mot de plus. La gorge serrée, je me contente donc de pousser le fauteuil de Chara à l’intérieur et jusqu’au plateau où je dois l’aider à se positionner. Loin de Kaylan, je me sens à nouveau dans mon élément. Je me baisse donc instinctivement à la hauteur de Chara, de manière à pouvoir la regarder dans les yeux. « Comment ça va, ma puce ? » Elle fronce les sourcils, étudiant sans aucune gêne chaque trait de mon visage. Elle semble aussi soucieuse que méfiante, et je ne peux le lui en vouloir. C’est en général ce que ressentent les enfants les plus jeunes, s’ils sont trop inquiets pour se laisser distraire par le matériel environnant. « Tu veux que je t’aide à monter sur le plateau ? » « J’ai pas envie de faire la radio. », dit-elle d’une petite voix, triturant nerveusement ses doigts les uns avec les autres. Je souris. « Pourquoi pas ? » « Parce que… », commence-t-elle, tournant la tête à gauche puis à droite. « Ca fait peur, ici. Où est Papa ? » « Il est juste derrière cette porte, tu vois ? », l’interrogé-je en lui montrant la porte blanche en question. « C’est vrai que c’est moche ici, tu as raison. Mais tu sais comme Papa te l’a dit, beaucoup d’enfants viennent souvent ici. Et en sortant ils sont heureux, parce qu’ils ont été super courageux. » « Mais j’ai pas envie d’être courageuse, j’ai juste envie de voir Papa. »

Ses yeux s’humidifient à vue d’œil, et mon estomac se tord douloureusement en conséquence. J’ai habituellement bien du mal à assimiler la douleur et la tristesse des petits, mais savoir à qui appartient celle qui est devant moi n’arrange en rien les choses. Nerveuse, je me redresse un instant, faisant un signe au radiologue de l’autre côté de la vitre en lui demandant quelques instants supplémentaires. Il semble impatient mais me gratifie d’un pouce en l’air. Il a l’habitude, avec les enfants. « Veux-tu que je chante ? », demandé-je doucement, reportant mon attention sur Chara. Elle renifle, puis hésite quelques instants. « Qu’est-ce que tu connais comme chanson ? Aïe… » Sa petite main se pose instantanément sur son ventre, signe que la douleur est encore bien présente. Avec grande légèreté, je pose la main sur son bras. « Viens, ma puce, on va monter là-dessus et chanter. Et tout ça sera vite fini. » Distraite par la douleur, elle me laisse la porter et la positionner sur le plateau. Je la sens tremblante sous mes doigts, si bien que j’ai du mal à la lâcher. Je pose doucement la main sur sa poitrine pour la calmer, replaçant une mèche de ses cheveux derrière son oreille de l’autre main. Une larme minuscule s’échappe du coin de son œil, terminant sa course dans ses cheveux. « Tu es bien installée ? », lui demandé-je dans un chuchotement. Elle hoche la tête de droite à gauche. « Je veux Papa… » Je pince les lèvres, impuissante. Je suis régulièrement confrontée à des enfants demandant à voir leurs parents, mais la petite n’a l’air réceptive ni au silence que je tente de dresser autour d’elle pour la rassurer, ni à une quelconque tentative de distraction. « Chara, hey, Chara, regarde-moi. » Je me dresse au dessus de son visage, tentant doucement d’écarter ses poings de ses yeux. Elle finit par me regarder, les yeux inondés de larmes. « Tout va bien, regarde. Je suis là. Et dès que l’on aura fini, tu retrouveras Papa. Et ça fera même pas mal, tu verras. » « Promis ? » Je souris tendrement. « Bien sûr, promis. » « Fais une croix sur ton cœur ? » Je m’exécute, surprise de reconnaître une réplique que je connais bien. Cette gamine est élevée à la sauce Disney, semble-t-il. « Okay… » finit-elle par dire, incertaine. Elle semble se détendre quelques secondes, me laissant le temps de faire signe au radiologue tout en approchant d’elle la machine à rayon X. En voyant le dispositif s’approcher d’elle, je la sens cependant se tendre à nouveau. Elle laisse échapper un sanglot minuscule, lequel me déchire le cœur. Je n’ai pas envie de lui infliger ça. C’est égoïste, mais pas à elle. Hésitante, j’appuie sur un bouton à quelques pas de moi, activant la communication entre le radiologue et moi. « Excusez-moi, vous pourriez demander à son père de vous rejoindre, afin qu’elle puisse l’entendre ? », demandé-je, parfaitement consciente que c’est loin d’être le protocole. Tant pis. Je n’ai pas envie de voir Chara s’effondrer devant moi, et je n’ai aucune envie de la rendre à son père dans un état plus déplorable que celui dans lequel elle est déjà. « J’ai pas l’droit Docteur, désolé. » répond-il, sans surprise. Je soupire. Comme s'il ne le faisait pas régulièrement. Ce mec a à peine prononcé deux mots qu'il m'agace déjà. « S’il-vous-plaît ? » Je lui lance à travers la vitre un regard désespéré. « Je ne suis pas censé… » « Je sais. Mais s’il-vous-plaît. La petite a peur. » Il étudie ma demande quelques secondes, durant lesquelles je me penche doucement sur Chara pour lui caresser délicatement les cheveux. A mon plus grand soulagement, il finit par disparaître.
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MessageSujet: Re: ❝there's still a part of me needing part of you❞ (kaylis)   ❝there's still a part of me needing part of you❞ (kaylis) EmptyMer 4 Oct - 22:41

❝there's still a part of me needing part of you❞ (kaylis) 4304950804171459
Le temps est long. Terriblement long. Je sais qu’Ailis n’a emmené Chara dans la salle de radio que depuis cinq minutes, si ce n’est moins. Mais je connais ma fille et je sais très bien que ses craintes étaient loin d’être apaisées au moment de me quitter. Et cette situation est loin de me plaire. Je ne doute pas en Ailis ni en ses compétences de médecin. Je n’en ai jamais douté et les sentiments contradictoires que je peux ressentir à son égard ne changeront jamais cela. Je l’ai vue à l’œuvre et je sais que devenir pédiatre est sa vocation. Elle est née pour s’occuper d’enfants, pour les sauver quotidiennement. Cependant, je ne peux m’empêcher d’imaginer Chara allongée sur le lit métallique, tremblante de peur et ravalant ses larmes pour se montrer courageuse. On dit souvent que les parents ont un sixième sens à l’égard de leurs enfants. C’est exactement ce que j’ai au sujet de ma fille. Elle peut être à des kilomètres de moi, j’arrive à sentir sa détresse. J’essaie cependant de ne pas trop y penser, observant ce qui m’entoure d’un air neutre. Je souris vaguement aux personnes dont je croise le regard, faisant tout pour positiver. Quand tout à coup, je sens mon téléphone vibrer. L’extirpant de ma poche, je constate un message de mon frère qui me demande des nouvelles. Pinçant mes lèvres, je lui réponds en lui exposant les faits, lui racontant que j’attends le verdict des radios mais qu’il est fortement probable que Chara ait l’appendicite et doive se faire opérer. Kaleb me rassure en me rappelant que tout se passerait bien, que sa nièce est une petite fille courageuse et qu’elle sera guérie en un rien de temps. Je le sais. Mais je ne peux pas m’empêcher d’avoir peur.

« M’sieur ? » La voix masculine m’oblige à lever les yeux de mon téléphone. Je m’apprête à me faire reprocher le fait d’utiliser cet appareil dans un endroit comme celui où je me trouve actuellement, mais au lieu de ça, je me retrouve face à un jeune homme d’à peu près mon âge qui me toise d’un air lassé. « Le docteur James vous demande. » Mon sang ne fait qu’un tour. Pourquoi Ailis demanderait cet homme, que je devine être le radiologue de par la pancarte suspendue à sa blouse, de venir me chercher ? Est-il arrivé quelque chose ? Je n’attends pas pour me lever et suis le brun jusqu’à me retrouver dans une petite salle vitrée conjointe à celle où trônent les immenses appareils radiologiques. Je reconnais sans aucun mal Ailis qui, penchée en avant, doit être en train de rassurer Chara. Alerté, je regarde le radiologue et lui demande silencieusement ce que je dois faire. Il lève légèrement les yeux au ciel, je me retiens de le remettre à sa place. Il finit par m’indiquer l’interrupteur permettant de faire la liaison sonore entre les deux pièces. J’appuie et m’empresse de prendre la parole. « Chara ? » La concernée sursaute sur la table et essaie de se redresser, retenue délicatement par la doctoresse. « Papa ? » J’arrive à croiser son regard. À peine mes pupilles rencontrent les siennes que j’entends sa petite voix brisée pleurnicher doucement. J’enfonce davantage le bouton avec mes doigts, comme si cela me permettait de me rapprocher de ma fille. « Non, hey, ma puce, ne pleure pas. Je suis là, juste là. » Pour la première fois de ma vie, je ne sais pas quoi lui dire d’autre pour la calmer. J’ai toujours trouvé les mots qu’il fallait, les gestes pour parvenir à apaiser ses peurs. Mais la distance et la vitre qui nous sépare m’empêche d’agir librement et me fait perdre mes moyens habituels. « J’ai peur, Papa. J’veux pas rester ici. Viens. », pleure-t-elle en s’agrippant à Ailis qui me lance un regard désespéré. J’essaie de lui faire comprendre que tout ira bien avant de regarder à nouveau ma fille. « Je ne peux pas venir. Je dois rester ici, mais je suis là, tout près. Rien ne peut t’arriver, d’accord ? C’est sans danger. » Ma voix est calme et dissimule bien des remous. Elle encaisse mes paroles, comprenant sans mal que je ne partirai pas et qu’elle ne risque rien. Mais elle n’a que quatre ans, et faire cette radio doit se montrer comme une épreuve insurmontable à ses yeux d’enfant. « Mais j’veux pas faire la radio... » Ses pleurnichements me brisent le cœur. Je regarde le radiologue et me retient de lui demander si je peux aller la voir. Ce type a l’air aussi empathique qu’un concombre.

Je laisse passer quelques secondes, réfléchissant à un moyen de la calmer et de permettre à Ailis de faire son travail. Une seule solution me vient à l’esprit et je n’attends donc pas pour la mettre en pratique. « Tu veux que je chante ? » Chanter dans cette pièce, pour ma famille, entendu par deux paires d’oreilles supplémentaires n’est certainement pas ce que je souhaite le plus au monde. Mais il le faut bien, pour ma fille. Je sais quel pouvoir apaisant peut avoir la musique sur elle, alors s’il faut que je chante de manière audible devant Ailis et ce fichu radiologue, je le ferai. « Oui... », finit-elle par répondre dans un souffle, déjà plus calme que quelques secondes auparavant. « Laquelle ? » « Comme avant. » Je n’aurais même pas eu à poser la question. C’était évident qu’elle me demanderait de chanter une nouvelle fois cette chanson étant donné qu’il s’agit de celle que je lui chante pour la bercer et la calmer lorsqu’elle va mal. J’acquiesce d’un signe de tête et lui fait comprendre silencieusement qu’elle doit se rallonger pour laisser Ailis faire son travail. Étonnamment, elle s’exécute sans broncher, sans pour autant lâcher la blouse de son médecin. Je déglutis doucement et me mets alors à chanter, en me rapprochant le plus possible du micro comme pour faire en sorte que l’homme à mes côtés ne m’entende pas. « Come stop your crying, it will be alright. Just take my hand, hold it tight. I will protect you from all around you. I will be here, don’t you cry. » J’observe la scène qui se déroule devant moi à mesure que les paroles franchissent mes lèvres. Chara est allongée, ses mains lâchant doucement les vêtements d’Ailis qui, avec toute la douceur du monde, caresse son front et lui sourit avant de commencer à ramener la machine par-dessus le petit corps de l’enfant. « For one so small, you seem so strong. My arms will hold you, keep you safe and warm. This bond between us can’t be broken. », continué-je d’une voix douce. Ailis s’est éloignée de la machine et adresse un signe au radiologue qui se rapproche de moi pour faire son travail. Mon regard croise alors celui de la blonde. « I will be here, don’t you cry. » Je ne sais pas si ces mots étaient adressés à Chara ou à Ailis. Certainement aux deux. Quoi qu’il en soit, je me noie dans son regard et le fait de prononcer ces paroles en la regardant de la sorte fait déferler un léger frisson le long de mon échine. Je continue les paroles, laissant les médecins faire leur travail et ne m’arrête qu’une fois la radio terminée. Mes yeux croisent à nouveau ceux de la jeune femme alors qu’elle aide Chara à se redresser. Je lui murmure un « Merci » silencieux. Un merci sincère que j’appuie à l’aide de mon regard. La hache de guerre semble enterrée pour une seconde. Mais combien de temps cela durera-t-il ?

J'ai essayé de faire plus court :uu: Et j'ai mis les paroles anglaises parce que la version française est trop courte :sisi: Oh et j'ai pas beaucoup avancé les choses non plus :OVO:
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Cloëlia W. Travis

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MessageSujet: Re: ❝there's still a part of me needing part of you❞ (kaylis)   ❝there's still a part of me needing part of you❞ (kaylis) EmptyMer 4 Oct - 22:41

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Il va me détester. L’évidence me saute aux yeux à l’instant où le radiologue franchit la porte qui le sépare du couloir où se trouve Kaylan. Préoccupée par les larmes de Chara, je n’ai pas réfléchi à ce que penserait son père si j’envoyais quelqu’un le chercher plutôt que de trouver moi-même un moyen de consoler la petite. Je n’y avais pas pensé, et à présent que je me retrouve seule avec mes pensées, je prends conscience de la bêtise dont je fais preuve. Je sais ce que pense Kaylan. Je sais qu’il me pense incapable de faire mon travail, qu’il imagine sans doute qu’aucun enfant n’est vraiment en sécurité si je suis désignée comme son médecin. Je sais qu’il me déteste de n’avoir pas su sauver Connor, peut-être plus encore que je me déteste moi-même, et c'est beaucoup dire. Je sais qu’il m’en veut de n’avoir rien pu faire pour ne pas être mêlée au traitement de sa fille. Et je sais qu’il ne me fait absolument pas confiance, en ce moment. Je sais tout cela, mais j’ai pensé à Chara avant de calculer les conséquences de mes actes. Et maintenant, il n’existe plus aucune chance qu’il me fasse confiance.

Kaylan surgit quelques secondes plus tard. Le son de sa voix mal assurée suffit à calmer les sanglots de Chara, que je sens se détendre instantanément sous la main que j’ai posée sur son ventre. Sans un regard dans ma direction, il entame une conversation avec sa fille qui, sans surprise, demande à ce qu’il vienne le rejoindre. Il fait alors preuve d’une douceur infinie dans ses paroles, calmant l’atmosphère toute entière par le seul son de sa voix. Et alors que dans une démarche puérile et désespérée, je me laisse malgré moi rassurée par les mots qu’il prononce sans même qu’ils ne me soient destinés, il se remet à chanter. Et cette fois, je suis incapable de ne pas le regarder. Inconsciemment, je pose la main sur celle de Chara. Je la caresse doucement du pouce, au rythme des paroles qui emplissent la salle d’une douce quiétude. Le cœur battant, j’observe Kaylan sans ciller, presque ensorcelée par sa tessiture alto alors que lui-même semble avoir franchi la barrière d’un autre monde. Suspendue à ses lèvres, je ne remarque même pas que les miennes miment presque imperceptiblement les paroles qu’il prononce. C’est Chara qui me le fait remarquer, ayant apparemment constaté que je ne passais plus mon temps à essayer de lui faire faire quelque chose qu’elle n’avait pas envie de faire. « Tu connais Tarzan ? », chuchote-t-elle, retournant aussitôt la tête vers son père pour continuer de l’écouter à chanter. « Un peu, oui… », réponds-je avec la même discrétion. Un léger sourire illumine mon visage tandis que je détache les yeux de la fillette pour risquer un nouveau regard vers Kaylan, qui termine le premier couplet. « I will be here, don’t you cry. » Je croise son regard le temps de ces quelques mots, et baisse instantanément les yeux, l’estomac traversé d’une vague douleur mêlé d’un frisson incontrôlable. Notre regard échangé n’a duré qu’une seconde, à peine, et j’ai malgré tout l’impression qu’il me traverse encore de part en part. Les paroles qu’il a prononcées ne m’étaient évidemment pas destinées, mais sa seule manière de le faire suffit à me ramener des mois en arrière. Sa douceur me manque. Ses regards me manquent. Il me manque. Mais tout ça n’a aucune importance. Je m’impose donc la reprise du travail, parvenant tant bien que mal à faire collaborer Chara, qui, le visage tendu par la douleur, ne détache pas les yeux de son père. Quelques minutes me sont suffisantes pour réaliser sa radiographie abdominale, si bien que lorsque la voix de Kaylan s’éteint alors que j’aide précautionneusement la fillette à se réinstaller dans son fauteuil, je suis prise par surprise. Je tourne donc instinctivement le regard vers lui, et suis étonnée de croiser le sien. « Merci. », lis-je sur ses lèvres avant de pincer les miennes. J’ose un petit sourire dans sa direction mais reporte mon attention sur Chara. Peu importe ce que son simple mot peut bien me faire ressentir. Peu importe que sa seule vision suffise à me donner envie de sourire. Il faut que je me ressaisisse. « Tu vois, ma puce, c’était pas grand chose, pas vrai ? », dis-je, le sourire aux lèvres. « Oui. Mais Docteur, je peux te demander quelque chose ? » « Bien sûr. » « Il n’y a pas de voyage dans le temps, après la radio. Pas vrai ? » Je fronce les sourcils, amusée. « Mon Papa m’a dit ça. Mais il dit toujours n’importe quoi. » Je ris, incapable de me retenir. Si seulement Kaylan disait effectivement toujours n’importe quoi, la vie ne serait pas ce qu’elle est. « Peut-être pas. Peut-être que ton Papa sait quelque chose que je ne sais pas. » Je l’observe croiser les bras devant elle, boudeuse. « J’crois pas. » « Allez, viens, on va le retrouver. »

Doucement, je pousse le fauteuil de Chara à l’extérieur, tenant au passage la porte à un autre médecin et à son patient. Je serre la gorge en croisant le regard de Kaylan, qui patiente près de celle-ci. J’aimerais le remercier pour son aide, mais je n’ose même pas un regard vers lui tant je me doute de ce qu’il pourrait me répondre si j’avais le malheur d’évoquer la bêtise dont j’ai fait preuve à l’intérieur. Je me contente donc d’admettre vaguement sa présence, revêtant ma blouse et mon attitude de médecin. « Les radiographies devraient être prêtes rapidement. Je vous reconduis à l’étage et je reviendrai vous voir avec le docteur Pearson. » Je m’exécute en silence, laissant Chara raconter son expérience à son père, dont j’évite soigneusement le regard. Une fois dans la chambre de la petite fille, je sors si vite que j’ai presque l’impression de courir, et redescends frapper à la porte du radiologue. En me voyant, il hausse les sourcils. C'est cette fois une certitude, je hais ce type. « C’était quoi, ce petit intermède musical, Docteur ? » « Vous avez les radios ? », réponds-je sur un ton professionnel. « Oui. Petite inflammation de l'appendice iléo-cæcal. Mais rien d’alarmant pour le moment. » Je soupire, m’adossant contre la porte en récupérant les clichés que me tend mon collègue. « Merde… Pearson a demandé l’imagerie parce que les leuco ne sont qu’à 11 000 et la fièvre à 38. On pensait peut être éviter l'opération. » « Et la CRP ? » « 7. C'est le seul problème. » « Ah ouais. Bah vous avez quand même l’air bien partie pour une appendicectomie. » Je pince les lèvres. « Oui… Merci. », Réponds-je vaguement avant de disparaître derrière la porte. Par chance, je remarque la présence de mon titulaire à quelques mètres de moi, en pleine conversation avec le chirurgien à la tête du département de neurochirurgie. J’attends patiemment qu’il constate ma présence et finis par m’approcher, une fois son collègue parti. « Des nouvelles pour la petite Maxwell ? » « Oui », réponds-je lui remettant les radios de Chara. « Inflammation minime de l’appendice. » « Et qu’en pensez-vous ? » Je pince les lèvres, observant le médecin porter les radios au dessus de sa tête pour les lire à travers le néon fixé au plafond. « Difficile à dire. La fièvre n’est pas très haute, mais la petite n’a pas l’air d’être du genre à faire semblant de souffrir. Avec la CRP à 7, ça me semble difficile d’éviter l’opération. Le mieux serait de la mettre en observation quelques heures sous antibiotiques, et de refaire un examen sanguin pour constater l’évolution. » « Très bien, je vous laisse expliquer ça à son père, alors. » Oh, non… « Bien. » « Merci Docteur. » Il me remet les radios et disparaît, me laissant seule avec moi-même. D’un pas traînant, je remonte au service pédiatrie, passe consulter le dossier médical informatisé de Chara pour relever ses potentielles allergies et prends la direction de la réserve, pour me procurer les antibiotiques que je vais devoir lui administrer. Je me retrouve devant la porte de sa chambre quelques minutes plus tard, me demandant comment j’ai pu faire preuve d’autant d’efficacité et de rapidité en ayant eu si peu envie de remettre les pieds ici. Prenant mon courage à deux mains, j’inspire profondément et pousse la porte, me retrouvant une nouvelle fois face à Kaylan et à sa fille. « Monsieur Maxwell. Alors… », commencé-je en croisant son regard, avant de poursuivre mécaniquement. « J’ai croisé le docteur Pearson, mais il n’est pas avec moi car nous n’allons pas forcément opérer tout de suite. L’inflammation n’est pas très importante et nous souhaiterions voir si des antibiotiques pourraient éviter une opération à Chara alors… Nous referons un examen sanguin dans quelques heures pour constater l’évolution. Ca te va, ma puce ? » Elle fronce les sourcils, septique. « Est-ce que je vais devoir refaire une radio ? » Je souris. « Probablement pas. On espère que non, en tout cas, et que les médicaments que tu vas prendre vont arranger les choses. En revanche, on va devoir recommencer avec l’aiguille. » « Je m’en fiche de l’aiguille, j’veux juste pas aller à la radio. » « Ca marche, c’est noté. », dis-je, le sourire aux lèvres en entreprenant d’introduire les antibiotiques dans sa perfusion. Je contourne ensuite son lit et m’installe du côté opposé à celui de Kaylan. « Tu as encore mal ? », lui demandé-je. Elle plisse le nez. « Un peu, mais ça va. » « Très bien, on croise les doigts pour que ça ne fasse plus mal bientôt. » Je lui souris et lève les yeux vers Kaylan, distraite. « Tu veux aller à la cafétér… ? » Je m’interromps, sonnée. Les battements de mon cœur entreprennent une valse effrénée, et il me faut quelques instants pour réussir à ignorer la douleur réapparue dans le creux de mon estomac. « J’veux dire… Vous pouvez aller à la cafétéria, si vous avez besoin de quoi que ce soit. Chara peut bouger avec sa perfusion, mais il serait mieux qu’elle reste au lit. Je repasserai régulièrement la voir. » Je baisse les yeux et me lève, prête à quitter la pièce.
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Cloëlia W. Travis

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MessageSujet: Re: ❝there's still a part of me needing part of you❞ (kaylis)   ❝there's still a part of me needing part of you❞ (kaylis) EmptyMer 4 Oct - 22:41

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Le cœur battant la chamade, je n’arrive plus à détacher mon regard d’Ailis. J’étudie chacun de ses gestes, tous plus minutieux les uns que les autres. Peut-être est-ce pour m’assurer qu’elle fait les choses correctement et s’occupe de ma faille comme s’il s’agissait de la sienne. Peut-être est-ce parce que sa présence agit comme un aimant sur mon attention, comme elle le faisait il y a plusieurs mois de cela. Tout ce que je sais, c’est qu’il m’est impossible de regarder autre chose que sa silhouette. Je détaille sa chevelure dorée ramenée en queue de cheval, j’observe ses mains manipuler Chara avec toute la douceur du monde. Et mon cœur palpite, palpite, palpite… « J’vais devoir vous demander de sortir. » La voix du radiologue me fait brutalement revenir sur terre. Je détourne mon regard dans sa direction, lui adressant une moue tout sauf sympathique. « Vous en faites pas pour ça… », lui réponds-je, dents serrées. Il hoche la tête, visiblement ravi de voir que j’obtempère sans lui imposer de résistance. Sans un mot de plus, je sors de la pièce et me retrouve à nouveau dans la cohue du couloir. Retenant un soupir, je m’éloigne de quelques pas et m’adosse au mur, face à la porte. Mon palpitant bat toujours dans un rythme accéléré. Je passe mes mains sur mon visage pour tenter d’éradiquer tous les sentiments contradictoires qui m’habitent. Je ne comprends pas. J’étais pourtant persuadé d’être en colère contre elle. Je suis en colère contre elle. Depuis des mois. Je ne pensais pas avoir à recroiser son chemin. Et pourtant… La voilà, à seulement quelques mètres de moi. Et je suis d’une faiblesse qui est loin de me ressembler. Je lui en veux, c’est indéniable. Mais le pouvoir qu’elle exerce sur moi semble être plus fort que la haine et la rancœur.

La porte finit par s’ouvrir, laissant apparaître ma fille, de retour sur son fauteuil roulant, poussée par une Ailis silencieuse. Nos regards se croisent à nouveau, et je devine sans aucun mal qu’elle est tout autant déstabilisée par la situation que je le suis. Mal à l’aise, je déglutis et dissimule toute émotion en détournant mes yeux pour les poser sur ma fille. « Tu as été très courageuse. Une vraie princesse Disney ! », m’exclamé-je en m’accroupissant face à elle avant de caresser délicatement ses cheveux et de replacer l’une de ses mèches derrière son oreille. Un sourire timide se dessine sur ses lèvres et réchauffe mon cœur. « Comme Rebelle ? » Je souris. « Encore plus courageuse que Rebelle ! » Je dépose un tendre baiser sur son front et me redresse. Hésitant, je finis par regarder à nouveau la jeune femme. Elle prend la parole rapidement, certainement consciente de l’atmosphère tendue pesant entre nous. « Les radiographies devraient être prêtes rapidement. Je vous reconduis à l’étage et je reviendrai vous voir avec le docteur Pearson. » J’acquiesce d’un bref signe de tête, puis, sans un mot de plus, nous nous mettons en route. Durant le trajet, Chara ne cesse de parler, me racontant en détails son aventure dans la salle de radiographie et remettant en question mes explications quant au voyage dans le temps. Je l’écoute d’une oreille distraite, prêtant davantage attention à la présence d’Ailis tout en veillant à ne pas laisser mon enfant parler seule dans le vide. Nous atteignons finalement la chambre et l’interne ne demande pas son reste avant de nous laisser en tête à tête, ma fille et moi. Je prends alors les choses en mains, soulagé d’être enfin seul et de ne plus avoir à lutter contre tout ce qui m’ébranle. Je fais alors passer Chara du fauteuil à son lit, l’y installant avec précaution et remontant sa couverture sur ses jambes. « Papa ? » Je plonge mon regard dans le sien, l’incitant à continuer. « Tu m’as pas répondu avant. » « Par rapport à quoi ? » « Le voyage dans le temps. Tu as menti, pour que je sois courageuse ? » Cette enfant est bien trop intelligente pour son âge. Pinçant les lèvres, je réfléchis un court instant et finis par me décider à lui raconter la vérité, à ma façon. « Je ne t’ai pas menti, Chara. Ce n’est pas un vrai voyage dans le temps, comme dans les films. On appelle ça une opération. » Elle penche la tête sur le côté en fronçant les sourcils. J’imagine son cerveau de petite fille travailler à toute vitesse pour tenter de comprendre le sens de mes propos. Je replace son coussin correctement et l’incite à s’allonger tout en m’installant sur la chaise à côté de son lit. « Quand on tombe très malade, on peut avoir besoin de se faire opérer. Du coup, on vient à l’hôpital, les médecins nous donne un médicament pour nous endormir et, pendant notre sommeil, ils peuvent travailler et faire le maximum pour enlever la maladie. » Le regard de Chara passe de l’intrigue à l’inquiétude. « Le Docteur va devoir m’enlever la maladie ? » Je caresse ses cheveux avec douceur, cherchant les mots pour la rassurer. « Les radios, cela permet aux médecins de voir si tu es malade et s’il faut t’enlever ce qui te fait mal au ventre. C’est pour ça qu’on doit encore attendre un peu, pour que le Docteur James nous dise si tu dois te faire opérer ou non. » Silencieuse, elle m’observe et finit par hocher la tête pour m’indiquer qu’elle comprend. Je suis impressionné et rassuré de voir la manière avec laquelle elle prend la nouvelle.

La porte se rouvre finalement, laissant Ailisi réapparaître… Seule. Je fronce légèrement les sourcils, la questionnant silencieusement sur l’absence de son supérieur. Elle ne comprend pas ma question sous-entendue, ou fait mine de ne pas voir mon expression faciale, et prend la parole. « Monsieur Maxwell. Alors… » S’ensuit alors une explication de la situation et un rapide échange avec Chara, qui se montre, une fois de plus, très courageuse. Je comprends tout à fait où la jeune femme veut en venir. Je connais les discours des médecins, les formes employées afin de ne pas effrayer l’entourage. Je sais lire entre les lignes, car j’utilise les mêmes tournures de phrase lorsque je dois annoncer une nouvelle plus ou moins mauvaise à un patient ou une famille. Le risque d’opération n’est donc pas du tout écarté. Coi, je laisse Ailis parler avec Chara, prenant soin de garder mon attention portée sur ma fille. Quand finalement le silence retombe, j’ose un regard en direction de la jolie blonde. « Tu veux aller à la cafétér… ? », me demande-t-elle avant de s’interrompre brutalement. Je crois voir ses joues rosir légèrement. Mon rythme cardiaque accélère sans que je ne détache mes yeux de son visage. « J’veux dire… Vous pouvez aller à la cafétéria, si vous avez besoin de quoi que ce soit. Chara peut bouger avec sa perfusion, mais il serait mieux qu’elle reste au lit. Je repasserai régulièrement la voir. » Sans me laisser le temps de répondre, elle se lève et tourne les talons. Poussé par un élan du cœur, je me lève à mon tour et me jette dans sa direction en l’appelant. « Ailis, attend ! » La rejoignant près de la porte, je puise au plus profond de mes forces pour m’empêcher d’attraper sa main. Je glisse mes paumes dans les poches de mon pantalon, encore une fois déstabilisé. Conscient qu’elle attend que je lui parle, je réfléchis à toute allure et reprends la parole. « Elle a besoin de repos. Je peux te retrouver plus tard ? » Qu’est-ce qu’il me prend ? Je ne pouvais pas juste la laisser partir, continuer son chemin sans m’interposer ? Humectant mes lèvres, je jette un regard à Chara qui est occupée à compter les gouttes perlant de la poche de sa perfusion. « Je crois qu’il faut qu’on parle. », soufflé-je en portant à nouveau mon attention sur Ailis. Mon plonger dans son regard de la sorte est douloureux. Mon palpitant bat de plus en plus fort dans ma cage thoracique, faisant naître en moi l’envie brûlante de porter ma main sur sa joue, de la prendre dans mes bras, de… Baissant la tête, j’attends qu’elle me réponde par la positive avant de retourner à ma place sans un mot, ni un regard supplémentaire pour la jeune femme qui finit par quitter définitivement la chambre.

« Tu connais le Docteur ? », me demande Chara quelques minutes plus tard, alors que je lui raconte une histoire pour lui changer les idées et tenter de l’endormir. « Pardon ? » « Tu lui as dit "tu", et tu l’as appelée Ailis. Et tu m’as toujours dit qu’on disait "vous" aux gens qu’on connaît pas, et "tu" aux gens qu’on connaît bien. » Je ne peux m’empêcher de laisser échapper un petit rire. Je vais finir par croire que ma fille a bien plus de quatre ans. « J’ai parlé sans réfléchir. » J’essaie de mettre un terme rapide à cette conversation. Je ne veux pas commencer à lui parler des histoires entre moi et Ailis. Cependant, elle insiste. « Tu la connais alors ? » « Et si tu essayais de dormir ? Il est tard, tu es fatiguée. » « C’est pas vrai… », me répond-elle d’une petite voix, avant de bailler à s’en décrocher la mâchoire. Je lui souris tendrement et me lève de ma chaise pour baisser le haut de son lit et de la faire s’installer correctement. « Allez, essaie de dormir. » Elle n’insiste pas et hoche doucement la tête, se replaçant comme elle le désire tandis que j’éteins la lumière de la chambre. Je reprends ma place près d’elle et la berce, jusqu’à être sûr qu’elle soit profondément endormie. Je m’éclipse alors de la chambre et m’approche de la première infirmière présente. « Excusez-moi ? Où est-ce que je peux trouver le docteur James ? » La femme en question me sourit poliment et, sans s’arrêter dans son activité, me répond : « Elle est occupée avec un patient. Je peux lui laisser un message ? » « Dites-lui que… Kaylan Maxwell l’attend. Je serai à la cafétéria. » Je lui laisse ensuite mon numéro en lui demandant s’il est possible de me prévenir si Chara est amenée à se réveiller, puis je longe le couloir afin d’emprunter l’ascenseur me permettant de rejoindre la cafétéria. Evidemment, cette dernière est totalement vide et fermée, compte tenu de l’heure avancée de la nuit. J’ai totalement oublié quel moment de la journée nous étions, avec tous ces événements. Mes pas me guident alors près de la première machine à café, afin que je puisse me servir de quoi me tenir éveillé. Je m’installe dans un des canapés mis à disposition pour patienter. Je ne sais pas combien de temps je reste là, presque parfaitement immobile en fixant un point invisible face à moi. Mais lorsque je reconnais la voix d’Ailis au loin, mon attention est automatiquement attirée par elle. Elle discute avec un collègue et, comme je m’y attendais, finit par se rapprocher de moi. Je me lève et glisse une nouvelle pièce dans la machine à café, tendant le gobelet fumant à la jeune femme lorsqu’elle me rejoint. « Je crois que c’est ce qui rapproche le plus de ce que tu as l’habitude de boire. », lui dis-je, dans un ton parfaitement neutre.
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